vendredi 4 septembre 2015

Texte de l'histoire continue

Un jour, sept muses découvrent un antre mystérieux. En entrant, elles aperçoivent un puits d'où jaillit une intense lumière. Elles en sont complètement aveuglées, mais vraiment attirées.
Elles entendent une voix étrange. Une mélodie envoûtante, les sept muses dansent. Et la ronde les transporte jusqu'à la mer. C'est alors qu'un grand voilier avec d'élégantes voiles roses s'approcha du rivage...
     Oh! Surprise! D'immenses oiseaux aux ailes de tôle survolaient la plage dans un vacarme étourdissant. Les gens hésitaient à descendre, car ils étaient étourdis tant par le tourbillon sonore que par la passerelle vacillante.
     C'est alors qu'ils eurent une idée.  On incita le plus téméraire du groupe à s'avancer vers un amas d'algues nauséabondes où sortait de terre une main gonflée. Celle-ci dont l'index pointait le Nord annonçait la tempête. Soudain, la main bougeât et salua la foule. Tous les gens pâlirent de terreur, hésitant devant l'horreur.
     "Malédiction!" s'exprima un curé horrifié, scandalisé. "Dieu nous punira tous!!!" Un ange arc-en-ciel surgit de la nuée et... Cita Prévert:" Notre Père qui êtes aux cieux restez-y." C'est alors que je me suis réveillé.
     J'étais assis par terre. Tout le monde autour de moi faisait la ronde et dansait, riait, chantait. Quand soudain un éclair zébra le ciel et me retourna à mon monde imaginaire où tout se déroule à un rythme effréné et endiablé... Qui me connait très bien. Je demeurai immobile dans mon lit d'hôpital, incapable de bouger!
     Et tout ce que je voulais savoir: est-ce que mon dernier texto avait été envoyé avant que la van qui me faisait face me frappe... Ou es-ce moi qui avait dévié de la route par inattention? Cette question demeurerait sans réponse jusqu'à ce que je retrouve l'usage de la parole... Et je me rendormis.
     Mais ce fut terrible car j'étais en train de rêver au deuxième chant de Lautréamont qui jouait en ritournelle, sans oublier les coups rythmés du violon strident. Je me suis réveillé et ce fut terrifiant, car des escargots géants rampaient dans mon lit. Je préférais de loin l'onirisme.
     Du coup, je fus prise d'une irrésistible envie de chanter "La mélodie du bonheur", le tout accompagné d'un orgue de Barbarie. Mais je dus me contenter d'une petite boîte de coquillages dans lesquels on entendait les lamentations torrides de mes jeunes années, entre les milliers de coquillages où habitaient de petits paysages que j'eu la chance d'admirer de par leurs ombres. 
     Étendu sur le dos, j'admirais le vent danser parmi les nuages. À cet instant, où je me sentais si calme et en paix, Léandre est entré par la petite porte. Il était en sueur. Je sentais dans ses yeux qu'il venait de croiser quelqu'un qui lui avait confié un secret. Que faire avec cette révélation? Comment faire maintenant pour rejoindre les six autres muses demeurées sur le voilier rose? Peut-être la tempête les avait emmenées très loin? Peut-être étaient-elles en train de faire l'amour en plein soleil avec les dieux du vent et de la mer... Ou encore, peut-être étaient-elles simplement en train de chanter "Vive le vent" en sirotant un petit verre de vin. On ne sait jamais ce qui peut se passer dans la tête de muses émancipées!
     Qu'importe ce qui leur était arrivé. Elles m'avaient laissé sur cette île maudite et il fallait que j'en sorte au plus vite. J'ai décidé de construire un radeau, mais il était trop tard. Alors, elle construisit un abri et s'endormit confortablement sur les coussins qu'elle avait construit avec des feuilles de palmier.
     Son nid était loin d'être douillet mais, c'était ce qui la ravissait, il lui offrait une voûte étoilée!! Ah!! Quelle extraordinaire vue... Et ça l'a fait rêver. Depuis sa tendre enfance elle s'imaginait dormir sous les étoiles, et voilà que la réalité dépassait la fiction! Regarder haut dans le ciel c'est voir le passé... Difficile à concevoir. "Oh! Le temps est si clair, je peux voir la nébuleuse d'Andromède non loin du carré de Pégase.  Ouf!" Elle se laissait flotter dans cette immensité en rêvassant de nouveaux soleils. 
     Au lever du jour, elle s'étira longuement. Elle ouvrit un œil, puis l'autre. Elle vit Léandre qui la regardait tendrement. "Bon matin!" lui dit-il, effleurant son front de ses lèvres.  La chaleur de ce doux baiser sur son front la rassurait. Un sourire se dessina sur son visage.
     Réalisant qu'il était là, étendu auprès d'elle, elle sursauta. Comment était-il arrivé là? Elle voulu le questionner: pourrait-il l'aider à sortir de cette île maudite?  Comme elle ouvrait la bouche, elle repensa au secret mystérieux que Léandre gardait pour lui. Peut-être ce secret était-il la source de toutes ses aventures... 
     Tous mes temps, mes conscients et mes inconscients, mes imaginaires et mes trop vérités s'ancrent dans la voûte de mon regard et heurtent mes rappels. Quelle est ma réalité? Le rose de mes muses sous des voilées de tôle, mon île captive qui berce mes sommeils de feuilles de palmier, mes rêves cahoteux martelés de frissons dans mon lit d'hôpital, ou... Finalement, suis-je devenue complètement folle et ma réalité s'évapore au-delà de moi-même? Revenir à ma réalité m'est devenu essentiel. Était-ce un mirage? Elle vit au loin s'avancer fièrement six dames aux allures bohème, qui dévalaient la pente abrupte de la réalité.
     Léandre est bien là. Elle le touche doucement de peur de l'éveiller. Elle sent une légère sueur sur son visage, donc il est vivant. Ai-je dormi? Est-ce mon imagination? Suis-je vraiment à l'hôpital?
     Lâcher prise... Lâcher prise. À quoi me servent ces questionnements quand ma priorité serait de trouver mon identité.  Ce serait le point de départ. Pourquoi Léandre ne me nomme pas? Si je le reconnais, il doit me connaitre en principe, non?
     Un vent tournoie dans sa tête. Elle se sent excitée, et pour un instant, ses yeux prennent feu devant une vision horrible: un cordon ombilical ensanglanté pend du plafond, se battant en contorsions, tentant de s'attacher — de se détacher? —d'une énorme goutte de sang suspendue dans les airs. Est-ce une naissance? Une naissance à l'envers? Non, il n'y a pas de placenta ici — ici, il n'y a qu'une robe rouge suspendue, rouge canneberge, un bijou brûlant dégringolant vers la Terre — ou vers le ciel... Mais elle doit trouver Léandre, et lui demander pourquoi il a fait ce qu'il a fait.
   Où et qui me côtoient dans cet hospice infâme? Depuis un mois, la muse de 92 ans avait abouti aux soins palliatifs. Indépendante toute sa vie, la voilà soumise à son sort, personne ne venant la voir. À côté, une voisine lui marmonnait des souvenirs passés: un travail peu onéreux, et elle parvenait à soutenir sa famille. Les deux femmes se supportaient dans des propos banals de tous les jours.
     Où sont rendues les six autres muses? Dans mes rêves ou dans mes souvenirs. Je dois sortir d'ici au plus vite pour retrouver Léandre pour la suite des choses. Où le retrouver, Léandre? Sur le voilier, ou sur le quai du voilier? Je me souviens de la muse de la musique. C'est agréable de l'entendre chanter et jouer du piano. La muse de la danse qui virevolte...
     Ouh là là! Je ne saurais dire. "Ce délire n'en finira donc jamais!" lui dit Léandre devenu tout à fait incapable de suivre le cours de l'histoire. Puis, il se leva et se mit à danser la claquette en fermant les yeux et en tirant la langue, car il en avait assez de chercher à tout prix à faire du sens. Il préférait la folie pure.
     En le voyant, la muse Erato se mit à rire et lui raconta son rêve de vieille femme confinée aux soins palliatifs. Sa bonne humeur lui faisait tellement de bien qu'elle l'aurait suivi n'importe où.  C'est bien ce qui arriva.
     Elle le suivi de l'autre côté du miroir, celui reflétant le monde de la folie pure. De ce côté du miroir se trouve l'Erup Eilof*, ce monde où la folie est simplement raison.
     Elle avait les yeux fermés, mais elle sentait bien sur son ventre ces mains qui n'étaient pas les siennes, qui remontaient doucement vers sa poitrine qui se soulevait maintenant — de désir? — Oh ces mains chaudes... Comme elle voudrait que ce soient celles de Léandre!  Mais Léandre était si loin... Tellement loin... Espérer son retour était impensable, à moins que...
     Le rêve n'a pas de limites, de frontières... Espérer toujours, voilà ce qu'elle décida! Mieux que le téléphone, le rêve la guida jusqu'à Victoria où elle renoua avec un être cher, parti depuis une décennie. Reviendra, reviendra pas?

* "Folie pure" lettres inversées

1 commentaire: